Lundi 15 – Encore un instant indien…

Pour aujourd’hui, je n’ai pas prévu grand-chose. Je dois être à l’aéroport en milieu d’après-midi pour retourner à Delhi. En retournant faire un tour vers la citadelle, je m’arrête au temple Jagdish, qui est le grand temple du quartier. Il est aussi magnifiquement sculpté. C’est l’heure de la messe. Je jette un œil timide à l’intérieur. On me fait signe d’avancer, je suppose que c’est pour être parmi les hommes, devant, les femmes étant à l’arrière. Le prêtre accomplit des gestes rituels pendant que tous les fidèles chantent des prières joyeuses et rythmées en s’accompagnant de cymbales miniatures. L’ambiance est chaleureuse, mes voisins me lancent des regards complices. A la fin, le prêtre apporte à tous une pincée d’offrande, qui est une pâte qui fait penser à du lait en poudre qu’on aurait délayé avec très peu d’eau. Je pense à la propreté des mains de l’officiant, à celle du papier journal dont il emballe la substance et finalement ma curiosité (ou ma peur de vexer) est plus forte que mon hypochondrie, je mange la boulette. En sortant du temple, j’achète pour les enfants des autocollants de divinités à la boutique d’objets pieux en face du temple, des Ganesh joufflus et des Krishna bien bleus. Je déambule tranquillement, absorbant quelques dernières bouffées du chaos urbain : ici un saint homme qui remonte la rue sur son éléphant, là sur un panonceau rouillé, une publicité peinte à la main pour des examens d’anglais professionnel, là encore une pierre sacrée sur le trottoir ou dépassant d’un mur, peinte en orange et recouverte de papier d’argent.






















Je dépasse à pied la citadelle et arrive à un grand parc tranquille. Il y a un petit train, presque un jouet, qui permet de le parcourir. Des panneaux annoncent le zoo avec ses ours (« beers »), tigres et léopards, assez piteux malheureusement. De l’autre côté c’est un quartier animé, proche de la gare. Je prends un touk-touk pour Shilpgram, le village artisanal. Situé à quelques kilomètres de la ville, dans de belles collines, c’est un complexe artistique et architectural qui vaut la visite. Des maisons de tous les styles du nord de l'Inde y ont été construites ou déplacées. On y trouve des cases, des demeures rajpoutes, des caravansérails. Il y a un petit musée, drôlement conçu, en colimaçon. Je dérange le gardien qui était en train de se raser. L’intérieur est assez scolaire, avec des cartes coloriées représentant je ne sais quoi, mais une belle collection d’ustensiles et surtout de masques. Dans le village, sous des auvents, différents artisans proposent leurs productions. Tissus, soieries, poteries, sculptures. Très peu de visiteurs aujourd’hui, je crois bien être le seul et je suis évidemment sollicité de toutes parts. J’achète finalement deux foulards en soie à un tisserand qui m’explique comment il teint à la main les fils de la trame à partir de cartons où est dessiné le motif point par point. J’achète aussi quelques foulards de coton fantaisie à l’échoppe d’un jeune indien aux yeux de gazelle, que j’avais rencontré la veille chez Papa. Il est fier de mon montrer son livre d’or, où des Européennes de tous les pays se pâment d’admiration et regrettent d’être mariées. Je lui ajoute un mot en espagnol…

Je me fais déposer près du lac pour une dernière promenade. Les premières gouttes me surprennent près du Amet Haveli alors je fais une halte sous l'auvent de la terrasse. Cela tombe bien, j'ai faim, je dévore des excellents nan avec une bière Kingfisher. Je laisse passer l'averse en dessinant. Ensuite, un peu de lèche-vitrines, sans conviction, tout me semble affreux. Et c’est déjà l’heure de fermer les valises. Shaabir m’attend pour l’aéroport. Nous faisons le trajet sous une pluie battante et dans des embouteillages. Il slalome avec habileté et finalement me dépose à l’heure. J’ai même le temps de picorer les rayons de la librairie et de repartir avec la vie de Krishna en bande dessinée et un recueil d’essais sur l’Inde d’Amartya Sen (très intéressant), The Argumentative Indian. L’odyssée n’est pourtant pas finie. A cause du mauvais temps, l’avion qui venait de Delhi s’est dérouté vers Hyderabad et prochainement nous vous donnerons de plus amples informations, etc. Le refrain bien connu des habitués d’aéroport. Et là, surprise, non seulement des informations sont données régulièrement mais les agents de la compagnie arrivent dans le hall d’attente et resteront là tout le temps au milieu de nous, donnant les dernières nouvelles, répondant directement aux questions et aux réclamations, apportant des sandwiches et de l’eau. Je recommande donc chaudement la compagnie ***. En fin de compte, après son crochet à Hyderabad et grâce au temps qui s’est un peu amélioré, l’avion arrive et nous faisons marche vers Delhi avec trois heures de retard.

J’ai réservé un hôtel tout proche de l’aéroport de Delhi. C’est une sorte de village de vacances avec paraît-il de beaux jardins. Malheureusement je n'en profiterai aucunement car il fait nuit noire quand j’arrive, en même temps qu’un groupe de Français en voyage organisé qui débarquent et ont le collier de fleurs au cou et le verre de punch de bienvenue à la main. La chambre est agréable si l’on excepte sa forte odeur de moisi. Je n’ai pas la force de protester, demain il faut se lever tôt (c’est une habitude !)

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